« La connaissance du naturel d’un cheval est un des premiers fondements de l’art de le monter, et tout homme de cheval en doit faire sa principale étude. » La Guérinière |
Être avec un cheval c’est être avec un autre individu. Nous sommes fondamentalement différents, nous possédons une communication différente inhérente à nos espèces respectives, mais nous avons ceci de commun d’être des sujets sensibles possédant des capacités d’adaptation donc d’apprentissage. Nous sommes donc capables d’ apprendre à Être l’un avec l’autre.
Domestiqué depuis près de 5 500 ans, le cheval est passé tour à tour du rôle de gibier, à celui d’outil agricole ou militaire jusqu’au statut de sportif, de gagne-pain puis enfin à celui de compagnon voire récemment d’accompagnant. Quelques hordes de chevaux encore sauvages subsistent là où ils ont l’espace certes, mais la majorité sont devant nos fenêtres, en train de pâturer tranquillement (si ils sont chanceux!)…
C’est un fait, nos chevaux sont domestiques et « habitent » avec nous. Nous sommes quotidiennement en étroite cohabitation donc en relation quasi-permanente avec eux.
Autant que cette relation soit agréable ne pensez-vous pas?
Leur offrir un habitat se rapprochant le plus possible de leur habitat naturel (vivre avec des congénères, le plus souvent possible dehors, avec un abri, etc) est un premier pas vers leur épanouissement certes ; mais, est de même importance l’alimentation qu’on leur distribue, les activités qu’on leur donne la possibilité d’avoir, le matériel adapté ou non que l’on utilise et la relation non conflictuelle qu’on leur offre :
J’apprends ce qu’est un cheval, par son simple statut d’être vivant je le respecte, il en est de même pour moi, ils apprennent à me connaître et à me respecter.
Me respecter n’est pas me craindre! C’est là qu’interviennent les connaissances éthologiques et psychologiques.
Dans un premier temps pour éduquer notre cheval, nous avons besoin de communiquer de la même sorte qu’ils le feraient entre eux. Notre stratégie est de les emmener peu à peu dans notre monde d’humains, en s’adaptant tout d’abord à leur propre mode de communication.
C’est en cela que le cheval est école de vie, car pour obtenir une relation de qualité, consciente, harmonieuse, basée sur la confiance mutuelle, nous devons être rigoureux en premier avec nous !
Pourquoi ?
Pour obtenir de nous une constante tranquillité d’esprit qui déteindrait presque comme par magie sur nos chevaux (presque car c’est en fait un véritable travail).
Pour une bonne éducation, voici quelques principes de « savoir-être » à respecter et bien sûr à coupler avec les connaissances éthologiques et psychologiques du cheval :
· Quand nous sommes avec nos chevaux, nous ne sommes qu’avec eux, reliés au présent.
· Nous nous sommes débarrassés de notre poids émotionnel parasite.
· Nous sommes prêts à nous remettre en question, à rester humble, persévérant.
· Nous sommes conscients qu’à partir du moment où nous sommes avec eux, nous sommes en situation d’apprentissage.
· Nous sommes vigilants à garder notre rôle éducatifs et/ou protecteur en toutes situations : rester serein sans perdre de vue notre objectif et l’action en cours pour y arriver sans rester têtu si cette action n’était pas la meilleure méthode.
· Nous sommes prêts à revenir en arrière dans les situations d’apprentissage si une chose n’est pas bien comprise.
· Nous faisons preuve de créativité quand il s’agit de découper en morceaux les apprentissages, car chaque cheval est différent par son tempérament, sa conformation ou son passif : donnez leur et donnez vous du temps! Pour les chevaux cette notion n’existe pas! Donnez leur le temps nécessaire pour comprendre et apprendre, chose difficile pour nous humains pour qui le temps est de l’argent… Et très souvent nous avons tendance à imposer nos échéances personnelles à nos chevaux…
· Nous sommes prêts à leur offrir des moments ludiques : embûches de désensibilisation, travail au sol, cirque, jeux en liberté, balade en main, faire brouter en main (ne signifie pas se faire traîner par son cheval d’une touffe d’herbe à une autre, dans ces cas-là, il vaut mieux le laisser en liberté!) ou encore des séances de massages et de stretching : tout est bon pour faire autre chose que du travail monté!
Attention, être avec les chevaux entend d’être capable de se remettre en question, je n’ai pas dit que c’était facile!Tous les jours, même quand on a de l’expérience, nous pouvons encore faire des erreurs ! Le tout est de les reconnaître pour chercher à progresser encore.
En tant qu’enseignante, et parce que je travaille des chevaux tous les jours, et parfois devant du public, il m’arrive de commettre des maladresses, voire des bavures, je le sais, je le dis également aux gens qui pourraient se trouver là à ce moment l: quoique qu’il arrive, restez honnête.Je vois déjà certains, derrière leur écran, « Mais c’est une thérapie! Pas une activité sportive! »… oui, je crois que vous n’avez pas tort.
Passons à la suite…
Pourquoi vouloir les monter ou les atteler ?
Je crains que la réponse soit : pour notre seul bon plaisir d’humain !
Deux arguments peuvent venir atténuer notre position d' »utilisateur » de nos chevaux : leur besoin de mouvement, souvent loin d’être rassasié dans un paddock de 2000 m carré (en étant généreux!)… et leur incroyable faculté d’apprentissage, qui, si celui est bien mené, peut apporter beaucoup de satisfaction au cheval.
Effectivement, bouger, marcher, les chevaux sont fait pour ça.
Que l’on soit cavaliers de loisirs privilégiant l’extérieur ou cavalier esthète voulant percer les mystères d’un dressage réussi ou bien encore cavalier dit sportif voulant transformer son cheval en athlète de haut-niveau, nous utilisons tous l’envie irrésistible du cheval de bouger.
Nous pouvons constater, quand le travail est bien fait, que le cheval prend plaisir à utiliser son corps et sa réflexion voire même à en augmenter les capacités (corps : flexibilité, mobilité, amplitude, cadence… réflexion : le cheval qui devient savant et qui joue avec l’homme).
Résumons : pour notre plaisir personnel, nous leur montons sur le dos, ou nous les attelons.
Autant être juste avec eux en leur offrant de comprendre ce qu’on le veut obtenir d’eux, non?
L’idée est de passer du simple utilisateur, au statut de partenaire. Comment ?
En leur expliquant pas à pas ce que l’on attend d’eux : pour arriver à l’objectif X, je vais d’abord expliquer le A, B et C qui compose mon X.
De même importance, à partir du moment où nous les « utilisons », nous sommes responsables de leur santé physique : une musculature de base donnée par un travail correct et régulier ainsi qu’une mise en main élémentaire, alliée à un travail sur la flexibilité de l’encolure, la mobilité des épaules et des hanches, sont à respecter comme une règle d’hygiène. Il en va de leur intégrité physique et de leur longévité.
Bouger, muscler oui mais comment ?
Trop souvent nous voyons des personnes monter sur leur chevaux, bardés d’artifices et essayer d’obtenir vainement des choses qui ne sont ni claires pour les chevaux ni pour les cavaliers : deux individus en conflit, communication coupée, plaisir nulle part.
Où est l’intérêt ?
Le travail ne doit pas être une corvée !
Même si, ne nous leurrons pas, c’est un vrai travail long et méthodique (car deux apprentissages : mental, puis moteur), il est important pour le cheval que cela reste logique, progressif et motivant.
« Demander souvent, se contenter de peu et récompenser beaucoup » Baucher. |
Même si le profond respect du cheval et l’amour que nous leur portons semblent être des raisons suffisantes pour nous pousser à nous poser les bonnes questions, c’est aussi un moyen d’obtenir un cheval performant, car un cheval mal dans sa tête, n’ira pas mieux dans son corps! (soi-dit en passant, les muscles sont les organes parlant de l’anxiété, sans décontraction jamais le cheval ne se livrera vraiment).
« Avec les chevaux, de la douceur est-ce que cela en vaut la peine ?… Oui, toujours! » Nuno Oliveira |